mardi 13 janvier 2009

Frères siamois





Les "cent meilleures audiences" : TF1 = 96 %, autres = 4 %. Information ou propagande ?


Il faut comprendre que France Télévisions dépense des millions d'euros chaque année pour se payer des sondages bidonnés, le tout pour se retrouver parmi ces fameux 4 %, autant dire pour se contenter de miettes !

Comment ne pas voir qu'il y a un "syndrome siamois" entre TF1 et France 2, syndrome qui a vu, dans un premier temps, les journaux de 20 heures se prolonger de manière synchrone vers les 20 h 45, comme certains films (de l'équipe du Splendid, par exemple) ont été programmés au même moment (surtout de la part de TF1), pour contrer le film d'en face, sur France 2, comme d'étranges déprogrammations sont intervenues (surtout sur TF1) pour contrer la saga estivale ou l'émission spéciale du camp d'en face, comme Koh Lanta a souvent migré sur la grille des programmes, etc.

Il n'a donc pas fallu attendre longtemps pour voir TF1 ajuster son journal de 20h au seul journal concurrent, de l'avis des gens de TF1: le JT de France 2 ! Parce qu'à TF1, il va sans dire qu'il n'y a qu'une chaîne concurrente : France 2 ! Le plus incroyable est qu'ils ne cherchent même pas à s'en cacher !

M'enfin, s'écrieront quelques naïfs : il n'y plus de réelle concurrence, dès lors qu'il n'y a plus de pub sur le service public. TF1 devrait plutôt se polariser sur M6. Oui, mais c'est sans compter sur un atavisme ancien, qui veut que la télévision française soit encore dirigée par des dinosaures sortis tout droit du temps où il n'y avait qu'une ou deux chaînes ! Ce qui fait qu'on ne se reconnaît qu'un adversaire : l'adversaire historique ! Et tant pis si la TNT multiplie le nombre de chaînes hertziennes par trois, ou si le câble et le satellite drainent les chaînes par centaines ! Pour les gens de TF1, il n'y a qu'une chaîne concurrente - et c'est cette névrose qui devrait les perdre ! - : France 2, et le fait que cette dernière soit privée de publicité après 20 heures n'y change rien.

Ce qui révèle, au passage, la vraie raison d'être de l'audimat : faire du service public le chien-chien de TF1, ce qui est le cas depuis l'offre de la chaîne à Bouygues et qui nous ramène à des pratiques de banana republic, la France étant le seul pays du monde occidental où l'on ait offert une chaîne publique à un entrepreneur privé, chose que ni Margaret Thatcher, ni Silvio Berlusconi n'ont osé réaliser chez eux !

Partout ailleurs, l'apparition de chaînes privées s'est faite "sui generis", les chaînes en question ayant été créées à partir des seules ressources de leurs créateurs, à l'instar de Canal Plus ou de M6. Mais il a fallu qu'une droite particulièrement bête et stupide, puissamment secondée, il est vrai, par une gauche incompétente à force d'inconséquence (Lionel Jospin annonçant, en 1987, le retour de TF1 dans le giron du service public !), fasse cadeau à un entrepreneur privé d'une chaîne publique historique, ce qui, en soit, constitue une forfaiture.

Imaginons, un instant, que la Gauche française, par le truchement de ses deux principaux détenteurs de pouvoir des deux dernières décennies : François Mitterrand et Lionel Jospin, ait été douée d'imagination et d'intelligence politique, pour, par exemple, instaurer le principe du referendum d'initiative populaire, et qu'en 1987, le peuple français ait été saisi par referendum d'initiative populaire pour ou contre la privatisation de TF1...

Cette privatisation aurait été rejetée par les Français, et nous ne serions pas, actuellement, en train de perdre notre temps à épiloguer sur le bon ou mauvais usage de la dernière lubie d'un caudillo !

Et les jérémiades pleines de remords, assorties de larmes de crocodile, de celui dont tout le monde a oublié qu'il fut, un jour, Ministre de la Culture - funeste destinée que celle d'exécuteur/trice des basses oeuvres ! -, le pauvre François Léotard ("je regrette qu'il n'y ait pas eu de 'mieux disant culturel' sur TF1", expliquait-il à Michel Drucker.) - n'y changeront rien.

En son temps, Valéry Giscard d'Estaing rêvait déjà de démanteler l'ORTF, et il y est parvenu. Et pourtant, tout porte à croire qu'on n'en soit jamais sorti, de cet ORTF, TF1 et France 2 étant rattachées comme par un fil invisible qui tiendrait du cordon ombilical, ou pire, de la laisse qui relie le maître à son chien-chien !

Pourquoi s'étonner, dans ces conditions, que la disparition de la publicité sur le service public oblige TF1 à raccourcir ses propres journaux ? Il n'y a plus de publicité dans le camp d'en face, publicité récupérée par les chaînes privées ? TF1 devrait en être ravie ? Pas du tout ! Voilà la chaîne Bouygues qui s'énerve, s'agite, bouscule ses programmes, montre combien elle est facile à déstabiliser !



(...) La Une joue l'indifférence. Raccourcir le JT n'est pas à l'ordre du jour et on ne touche pas aux débuts de soirée... Cette bonne blague !

Parce que, plus importante apparemment que les recettes publicitaires est la publication quotidienne des sondages, le fameux "dimat" des Guignols de Canal Plus, fondé sur des bidonnages systématiques !


Le "quotidien de référence" des intellectuels français participe lui aussi au décervelage ambiant : ici, il n'est nullement question de la qualité des programmes ! A ce petit jeu, on en viendrait à croire que Marc Levy est un bien plus grand écrivain que Toni Morrisson, prix Nobel de littérature, tout simplement parce qu'il vend plus de livres qu'elle ! Le problème est qu'aux sondages publiés ci-dessus, il manque manifestement une information essentielle, que l'on a délibérément passée à la trappe : le mode de réalisation des enquêtes.

L'audimat, voilà la clé de la course au mimétisme évoquée plus haut. Et quand Monsieur Duhamel Patrice nous parle d'exigence d'audience, on est en droit de s'attendre au pire !