mercredi 30 décembre 2009

Mort de rire !


Voici une coupure de presse tirée du quotidien gratuit Direct Soir, dans lequel le sémillant Jacques Séguéla, l'homme de la "Force Tranquille", joue les éditorialistes. Et ce jour-là, il était question de Ségolène Royal, qui n'était plus royale... J'avoue que le papier m'a fait hurler de rire !

Il est vrai que l'ex-mentor publicitaire de Mitterrand a tourné casaque depuis qu'on l'a vu superviser, sans grand succès - la roue tourne ! - telle ou telle campagne électorale pour les besoins de tel ou tel autocrate africain ou d'Europe centrale. Depuis, Séguéla joue volontiers les oracles ; et ne voilà-t-il pas, qu'à l'instar de pas mal d'autres, il s'intéresse à l'avenir politique de Ségolène Royal (mais au fond, pourquoi elle ?), laquelle, malgré son exil charentais, doit souvent méditer la formule : "on ne prête qu'aux riches !", quand on voit la montagne de sondages et de papiers qui lui sont consacrés.

Nous reparlerons, à n'en pas douter, des talents d'oracle de Jacques Séguéla ; c'est précisément la raison pour laquelle j'ai décidé d'archiver cet éditorial, qui m'a vraiment fait hurler de rire !

" "La reine est morte", disent ses ennemis, plus nombreux chaque jour. "Une star ne meurt jamais", se défendent ses fans, de plus en plus fanés... Le désaveu touche au désamour : en cote de popularité, Martine Aubry la devance désormais de vingt points..."

Pour mémoire : aux dernières régionales, Ségolène Royal s'en est allée arracher le fauteuil de présidente de la région Poitou-Charentes à la protégée de Jean-Pierre Raffarin, tandis qu'aux dernières législatives, Martine Aubry offrait gracieusement son fauteuil de députée à son concurrent de l'UMP. D'où l'affection sans limite de M. Séguéla pour Madame Aubry ; c'est humain !

Il y a tout de même une anomalie dans tout ce discours qui se voudrait dévastateur pour Ségolène Royal : puisqu'elle semble tellement hors du coup, comment expliquer le peu d'empressement mis par certains ténors de l'UMP de se porter candidats à la reconquête de la Région Poitou-Charentes ? On pense à un Jean-Pierre Raffarin, qui doit, tous les jours, ruminer la perte de la région par sa protégée, en 2004, ou encore à un Frédéric Lefebvre, toujours pas ministre, même pas sous-secrétaire d'État, et qui doit trouver les journées bien longues. Face à la Bécassine du Poitou, Frédéric Lefebvre ne devrait pas avoir trop de mal à l'emporter, non ? A moins que ce brave homme ne soit pas aussi "couillu" qu'il le prétend !

Par ailleurs, il semble que Monsieur Séguéla soit devenu hémiplégique, ou en tout cas, ait le cerveau terriblement sélectif - et en cela, il n'est pas le seul -, ce qui l'amène à zapper un certain nombre d'autres sondages, selon lesquels, par exemple - entendu sur Europe 1 la semaine dernière - Ségolène Royal arriverait en deuxième position, derrière D. Villepin et devant R. Yade, des personnalités ayant causé le plus de fil à retordre à Nicolas Sarkozy en 2009, ou encore cet autre sondage, révélant que Ségolène Royal arriverait en tête des présidents de Conseil Régional connus de leurs administrés, loin devant Georges Frêche. C'est dire si Madame Royal est loin de connaître le désamour espéré par notre publicitaire quelque peu avachi !

Jacques Séguéla, ou l'art de prendre ses désirs pour des réalités !



lundi 14 décembre 2009

Politocratie


Jean-Michel Normand écrit des articles dans le quotidien Le Monde. Jean-Michel Normand est un politocrate. Vous vous demandez certainement ce que c'est qu'un politocrate. C'est comme bureaucrate, phallocrate, autocrate, ploutocrate... La devise des politocrates pourrait être cette formule par laquelle Jules-Edouard Moustique entame toujours ses apparitions télévisées : "L'actualité, c'est vous qui la vivez, c'est nous qui en vivons."

Le politocrate Jean-Michel Normand s'est, donc, fendu d'un long papier dans Le Monde daté du 12 décembre 2009, un papier entièrement consacré à Ségolène Royal, sur une pleine page. Accroche : "Ségolène Royal multiplie les coups d'éclat, qu'elle décide parfois seule. Le but : s'adresser directement à l'opinion, au-delà du parti socialiste." Suit ce gros titre : La tactique du défi permanent.

Nous y lisons, entre autres choses, ceci : Ségolène Royal peut se flatter d'avoir expérimenté un mode opératoire inédit : détourner un événement politique extérieur afin de l'amplifier et d'en devenir l'épicentre. Ce fut le cas de son attaque en piqué, qui, le 14 novembre, a semé le trouble, à Dijon, lors de la réunion du Rassemblement socialiste, écologiste et démocrate. Ou du brulôt de sa proposition formelle d'alliance dès le premier tour en Poitou-Charentes, expédiée en plein congrès du Modem réuni à Arras...

Détourner un événement politique extérieur, nous dit Monsieur Normand. Et c'est là qu'on aimerait savoir en quoi la réunion d'un club socialiste, dont nous savons que sa seule raison d'être, à l'origine, fut de soutenir la candidature de Ségolène Royal à la tête du parti, serait assimilable à un événement politique extérieur (à Ségolène Royal, s'entend) ; du reste, il suffit de lire, dans les forums de discussion, les contributions des militants dudit courant, pour comprendre que, pour l'écrasante majorité d'entre eux, Ségolène Royal était chez elle à Dijon ! Quel dommage que monsieur Normand n'ait pas commencé par reconnaître cette évidence ! Cela lui aurait probablement évité de pondre un long article, pour le coup, devenu obsolète !

Quant à la proposition d'une alliance avec le Modem, lors des prochaines régionales, on ne voit pas très bien, là encore, ce que cela a d'extérieur..., s'agissant d'une proposition destinée uniquement au Modem local et non à l'appareil du parti de François Bayrou.

Jean-Michel Normand : (...) La bataille pour 2012, désormais, n'est plus celle du Parti mais celle de l'opinion, à laquelle il faut adresser régulièrement des messages. (...) Au PS, justement, beaucoup évoquent une fuite en avant... Ségolène Royal radicalise ses formes d'intervention. Elle est devenue un leader populiste de gauche. Et les populistes ne font pas de la politique comme les autres... Ce décalage entre le PS et celle qui a porté ses couleurs en 2007 fait resurgir la question récurrente...

À propos du "beaucoup évoquent une fuite en avant...", on se demande à qui M. Normand fait allusion : aux apparatchiks du Parti socialiste ou aux militants ? Et là, on se demande sérieusement si J.-M. Normand a la moindre idée du métier de "personnage politique", lui qui semble avoir oublié que la direction du parti socialiste n'a toujours pas porté plainte contre les deux journalistes qui l'ont, par pamphlet interposé, accusée d'avoir bourré les urnes lors de la désignation du premier secrétaire. Le même Normand semble s'étonner qu'un(e) élu(e) du peuple communique avec le peuple, ne serait-ce que pour rendre compte de l'avancement du mandat qui lui a été confié. Quant à la bataille pour 2012, où Monsieur Normand a-t-il entendu Ségolène Royal affirmer qu'elle constituait son horizon immédiat ? Dans toutes ses interventions récentes, Ségolène Royal a toujours affirmé qu'elle avait d'autres préoccupations pour le moment. N'est-ce pas faire preuve d'une phénoménale mauvaise foi que de s'entêter à faire dire à quelqu'un le contraire de ce qu'il/elle dit ?

Par ailleurs, notre politocrate du Monde semble avoir oublié un des fondements mêmes du système bonapartiste mis en place par De Gaulle en 1958/1962, consistant à faire de l'élection présidentielle la rencontre d'un homme/d'une femme avec le peuple, le tout, sans recours aucun (surtout pas !) à l'intermédiation d'un parti politique. Jean-Michel Normand imagine-t-il Charles de Gaulle suspendu à l'investiture d'un parti politique pour se présenter à l'élection présidentielle ?

Malgré toutes ses contorsions, pour, in fine, se contenter de répéter les mêmes choses entendues mille fois au sein d'un certain microcosme (Ségolène : la cousine un peu marginale de la famille), Jean-Michel Normand a tout de même réussi quelque chose qu'il n'avait certainement pas prévu, à l'entame de son papier : nous prouver que Ségolène Royal est la seule responsable du parti socialiste à avoir parfaitement intégré les fondamentaux de la Cinquième République, d'où ce qu'il appelle le "décalage" avec le Parti !

Parce qu'il faudra bien que les bonapartistes refoulés du ci-devant Parti socialiste finissent par intégrer le fait que les partis politiques n'ont strictement rien à voir avec l'élection du Président de la République au suffrage universel, et que ceux qui en doutent relisent les mémoires de De Gaulle !

Par ailleurs, rappelons que, lors de la présidentielle de 2007, la cousine un peu marginale a quand même obtenu une trentaine de points de plus que Jospin en 2002 ; elle est arrivée, au second tour, en tête dans des circonscriptions régulièrement perdues par la Gauche (comme dans le 5ème arrondissement de Paris, où Lyne-Cohen Solal s'est toujours ramassée, ou encore à Drancy, où le député-maire, Jean-Christophe Lagarde, a fait un carton aux législatives puis aux municipales, etc.) ; sans parler des Dom-Tom, où elle a fait beaucoup mieux que Jospin et la "régionale de l'étape", Christiane Taubira, réunis, en 2002 !

On se rappellera aussi qu'en 2007, Martine Aubry a "offert" son fauteuil de député à son concurrent de l'UMP, gentillesse que Vincent Peillon avait déjà commise, pour sa part, en 2002, avant de la rééditer en 2007, alors même que Ségolène Royal, quant à elle, mettait ses actes en accord avec ses paroles, en renonçant à son siège de député, tout en trasmettant le flambeau à Delphine Batho, histoire de conserver la circonscription à gauche. Voilà ce que monsieur Normand appelle agir en cousine marginale !

Quant au concept même de "coup d'éclat", monsieur Normand, dont on se demande si c'est un observateur neutre (= objectif) de la vie politique, ou alors le porte-parole de telle ou telle obédience partisane, n'hésite pas à avancer qu'"à plus court terme, une autre question contrarie (sic !) les dirigeants socialistes : quel coup d'éclat pourrait bien tenter Ségolène Royal, qui se rendra, mardi 15 décembre à Copenhague, au sommet sur le réchauffement climatique ?"

Et là, on pourrait imaginer tout ce qui pourrait "contrarier" les grands manitous du parti de la Rue Solférino : qu'Heuliez soit définitivement sauvé et que la présidente du conseil régional de Poitou-Charente profite de son séjour danois pour faire avancer la cause de la petite voiture électrique, attirant de nouveaux investisseurs au passage ? Que le prototype de lycée Haute Qualité Environnementale, créé en Poitou-Charentes, fasse des émules dans le monde entier ? Bref, que la région Poitou-Charentes, par l'intermédiaire de sa présidente, s'offre, et partant, offre à la France, un beau coup de pub au niveau international ?

Rappelons à Jean-Michel Normand le dernier coup d'éclat de Ségolène Royal au niveau international : lors de la commémoration du vingtième anniversaire de la chute du Mur de Berlin, Ségolène Royal est la seule représentante du parti socialiste à avoir fait le voyage, en tout cas la seule qui se soit fait remarquer, et surtout la seule, de tous les intervenants, à avoir souhaité voir tomber "tous les murs", on pense, notamment, à ce mur qui défigure la Palestine..., comme on se souvient que Ségolène Royal fut, durant la dernière campagne présidentielle, la seule personnalité socialiste à faire le voyage de Gaza, après avoir fait un crochet par le Liban, où elle a tenu à rencontrer tous les protagonistes de la scène politique. Pour fréquenter un bon nombre de Musulmans (comme de Juifs) depuis pas mal de temps, je suis en mesure de témoigner que nombreux furent les Arabes de France à lui en savoir gré, et je suppose que, là encore, Monsieur Normand y aura vu un signe de "marginalité", face à un Parti Socialiste que l'on n'a jamais entendu critiquer, ne serait-ce qu'un peu, la politique coloniale menée par Israël en Palestine, par exemple !

Mais le plus drôle du papier de notre politocrate du Monde, c'est ce verdict - que nous reproduisons dans son intégralité - affiché en exergue de son article, où l'auteur joue volontiers les oracles :

Se différencier du PS ne paie plus

Lors des primaires socialistes de 2006 et lors de la campagne présidentielle de l'année suivante, Ségolène Royal avait largement construit sa popularité en s'inscrivant en décalage par rapport au Parti socialiste. Il semble que cette prise de distance joue désormais à son détriment si l'on en croit le sondage BVA pour "La Matinale" de Canal+ publié vendredi 11 décembre.

Selon cette enquête (réalisée le 9 et 10 décembre, auprès d'un échantillon de 1020 personnes interrogées via Internet selon la méthode des quotas), une majorité de 62 % estime que Mme Royal devrait "soutenir les positions défendues par son parti" alors que 36 % considèrent, en revanche, qu'elle a raison d'"afficher son indépendance".

Par ailleurs, 74 % des personnes interrogées (66 %, chez les sympathisants de gauche) pensent que Mme Royal Royal constitue un "handicap" plutôt qu'un "atout" (26 %) pour la gauche. Enfin, interrogés sur la décision que devrait prendre l'ancienne candidate si elle devait quitter le PS, 35 % souhaitent qu'elle crée un nouveau parti et 45 % qu'elle cesse de faire de la politique (contre 39 % chez les sympathisants de gauche).

"Ségolène Royal avait suscité un immense espoir, et parfois une adhésion enthousiaste, mais le coeur n'y est plus", souligne Gaël Sliman, directeur du département opinion de BVA. Constatant que l'ex-candidate "est à présent largement distancée par les autres présidentiables", il pense que "sa seule chance de jouer les trublions dans des primaires socialistes serait que ses adversaires se divisent".

Fin du papier de Jean-Michel Normand.


Observons, en passant, que notre politocrate est réellement obnubilé par l'élection présidentielle de 2012, alors même que, pas une fois, l'élection à venir, à savoir le renouvellement des présidents des conseils régionaux, n'est évoquée, ce qui est, tout de même, incroyable !

Observons encore que Ségolène Royal semble être la seule personnalité politique dont l'avenir politique fasse l'objet de tant de spéculations, jusqu'à évoquer l'abandon de la vie politique, elle qui préside une région, quand d'autres doivent se contenter d'une mairie (ex. Martine Aubry) voire de quelques cantons (ex. François Hollande, Claude Bartolone), sans parler de ceux qui n'ont aucune circonscription hexagonale (ex. Vincent Peillon, Harlem Désir) voire se sont plantés aux dernières européennes (ex. Benoît Hamon) !

Questions : à propos de cette injonction : "Mme Royal devrait soutenir les positions soutenues par son parti", de quoi parle-t-on exactement ? De positions prises par le Parti après un vote régulier ? Monsieur Normand peut-il dresser une liste de "positions soutenues officiellement par le PS" et que Mme Royal n'aurait pas respectées ? La fraude commise lors du vote pour les motions fait-elle partie des positions soutenues par le parti ? L'opinion de tel ou tel apparatchik représente-t-elle une position soutenue par le parti ? Par exemple, en ce qui concerne les alliances avec le MoDem, l'alliance conclue par Martine Aubry, à Lille, vaut-elle "position soutenue par le Parti" ? Dans ce cas, comment Monsieur Normand va-t-il pouvoir nous expliquer que la même attitude, prônée en Poitou-Charentes, par Ségolène Royal, soit assimilée à une "marginalisation" ?

Autre chose : la soumission à une soi-disant "position soutenue par le parti" vaut-elle pour tous les socialistes ou uniquement pour Ségolène Royal ? On pense à la dissidence de Jean-Luc Mélenchon, élu sénateur sur une liste socialiste, et qui s'en va faire liste commune avec les communistes. Cette désertion relève-t-elle d'une position soutenue par le PS ? Et que dire des missions de Jack Lang pour Nicolas Sarkozy, à Cuba puis en Corée du Nord : faut-il comprendre, là encore, que le Parti socialiste avait, préalablement, donné son accord ? Tout comme il avait forcément donné son accord à l'entrée de Bernard Kouchner au gouvernement, de même qu'il avait autorisé Michel Rocard à codiriger une commision sur le grand emprunt... Autant dire que la fameuse formule : "Strauss-Kahn, à Washington, Kouchner, avec nous, Jack Lang, avec moi !", récemment entendue dans la bouche de son DRH, a été lue et approuvée par le PS !

Parlons du "handicap" que représenterait, pour le PS, celle qui, en 2004, a arraché la région Poitou-Charentes aux protégés de Jean-Pierre Raffarin. Celle-là serait plus "handicapante" pour le parti, que tous ceux, nombreux, à l'instar de Martine Aubry, Vincent Peillon..., qui ont fait cadeau de leur circonscription à la droite ? Parce qu'il faut bien supposer que Jean-Michel Normand est logique !

Voilà, donc, que Jean-Michel Normand, à la suite de BVA, s'inquiète de l'avenir de Ségolène Royal, et ce, à l'exclusion de l'avenir de tout autre responsable politique français ! La sagesse populaire ne dit-elle pas qu'on ne prête qu'aux riches ?

Précisément, à propos de "richesse", notamment en matière de notoriété, il semble que monsieur Normand soit un commentateur hémiplégique, ne disposant que d'une moitié de cerveau, de manière à ne voir les choses que sous l'aspect qui l'arrange. Parce que son papier, paru le 12 décembre, a été précédé d'un certain nombre de sondages, dont un sondage LH2 pour France Bleu, que notre politocrate a délibérément zappé :


Il ressort, donc, d'un autre sondage que celui évoqué par J.-M. Normand, qu'en termes de notoriété, Ségolène Royal arrive loin devant tous ses collègues présidents de conseil régional. Et c'est précisément en cela que l'on reconnaît les politocrates : dans leur incapacité à analyser scientifiquement les choses, se contentant, la plupart du temps, à se réfugier derrières truismes et lieux communs !

La France est un pays riche en politocrates, lesquels se font régulièrement passer pour les analystes politiques qu'ils ne sont pas, faute de rigueur scientifique. Ainsi ce pauvre Jean-Michel Normand, qui prend ses lecteurs pour des imbéciles, pour les croire incapables d'aller puiser d'autres informations que l'eau tiède qu'il leur sert à longueur de colonnes.

A l'image de ses collègues politocrates, on voit bien que J.-M. Normand n'est qu'un vulgaire commentateur de sondages : on croit qu'il analyse une situation, en fait, il se contente de paraphraser les chiffres tombés de BVA, CSA, Opinion Way... Parce que les politocrates ne sont que des girouettes, qui ne se hasardent à livrer un commentaire qu'après avoir humé d'où vient le vent des sondages. Et en ce moment, il semble que les sondages (pour 2012, vous aviez compris, parce qu'en dehors de la présidentielle, pas de vie publique qui vaille !) donnent Ségolène Royal devancée par..., par qui déjà ? Elle est la seule "présidentiable" à présider une région, soit autour d'un vingt-cinquième de la France, ce qui fait du Poitou-Charentes un excellent laboratoire. Mais précisément, malhonnêteté intellectuelle oblige, Jean-Michel Normand et ses compères politocrates semblent se désintéresser complètement de ce qui va se passer dans les régions, notamment en Poitou-Charentes, ce qui les dispense de répondre à cette question lancinante : mais alors, puisque Ségolène Royal est à ce point affaiblie, comment expliquer que les ténors de l'UMP se dégonflent l'un après l'autre (pourquoi Dominique Bussereau, pour affronter Ségolène Royal, et non pas Frédéric Lefebvre, lequel, normalement, ne devrait avoir aucun mal à terrasser la Bécassine du Poitou, à moins que Monsieur Lefebvre ne soit qu'un trouillard !), à la perspective de ramener le Poitou-Charentes à la droite ? La victoire de l'UMP devrait être courue d'avance, non ? À moins que les politocrates ne nous prennent vraiment pour des imbéciles, ce qui explique qu'ils zappent systématiquement cet important rendez-vous électoral.

Pour en finir avec monsieur Jean-Michel Normand, qui en est encore à faire du journalisme à la mode de Grand-Papa, ce monsieur et ceux de sa corporation devraient savoir qu'aujourd'hui, sur Internet, quelques clics de souris suffisent pour s'offrir des centaines, milliers, millions de pages d'opinions diverses sur une question, et le fait, pour les représentants d'une certaine presse écrite, d'en être encore à sélectionner des sondages, pour leur faire dire ce que l'on aimerait bien qu'ils disent, relève d'une conception tellement archaïque du journalisme qu'il ne faut pas s'étonner que les lecteurs férus d'information non biaisée, comme les couches les plus instruites ainsi que les jeunes générations finissent par se détourner de cette presse-là !



À bon entendeur !


Post-scriptum :

Obnubilé par la "cousine un peu marginale de la famille", notre politocrate du Monde en a oublié - mais les politocrates sont volontiers amnésiques, non ? - ces temps, pas si anciens, où le Parti socialiste était taxé d'"inaudibilité" et de manque de pugnacité face à la droite : "mais où donc est passée la Gauche et que fait le PS ?", entendait-on clamer partout. Le PS ? Celui de François Hollande, d'abord, puis de Martine Aubry, ensuite. Au point qu'on nous a expliqué, à longueur de colonnes et moyennant moult enquêtes d'opinion, qu'Olivier Besancenot serait devenu le premier des opposants à Nicolas Sarkozy.

Et voilà que d'autres politocrates nous disent, sondages à l'appui, que Ségolène Royal devrait se couler dans le moule PS, en clair, qu'elle devrait, elle aussi, participer à l''inaudibilité" du Parti ; est-ce bien cela que J.-M. Normand tente de démontrer ?

Parce que, des interventions tonitruantes, contre le pouvoir sarkozyste, Ségolène Royal s'est fait une spécialité. Souvenons-nous de ce passage au JT de 20 heures sur France 2, face à David Pujadas. Nous sommes à quelques jours du second tour des législatives de 2007. France 2 vient de consacrer un long reportage au régional de l'étape, Alain Juppé, sans qu'à aucun moment son adversaire socialiste ne soit citée, lorsqu'intervient, en direct, l'interview de Ségolène Royal, qui ne va faire qu'une bouchée de l'infortuné Pujadas. Mme Royal commence par tacler la partialité du reportage, qu'elle juge un peu trop favorable au maire de Bordeaux ; la suite est tout simplement gratinée :

- Elle s'appelle Michèle Delaunay, Mi-Chè-le De-lau-nay, tonne-t-elle, annonçant dans la foulée son prochain passage à Bordeaux pour soutenir sa consoeur socialiste. Un grand moment de télévision. On connaît la suite : Alain Juppé battu dans la "circonscription du maire", au point d'avoir dû abandonner son poste de N° 2 du gouvernement Fillon I.

J'encourage vivement Jean-Michel Normand à interroger Alain Juppé et d'autres (ex. les ex-maires de Strasbourg ou Toulouse, dont les concurrents PS ont reçu la visite de Ségolène Royal), sur le "handicap" que cette dernière ferait peser sur le Parti socialiste, notamment lors des campagnes électorales.

Ceux qui ont un peu de mémoire se souviendront aussi de cette autre interview télévisée, toujours sur France 2, un dimanche, face à Vincent Delahousse et au - en temps normal - très volubile Bruno Solo, lequel, ce jour-là, donnait l'impression d'avoir avalé sa langue ! Ségolène Royal va consacrer un long passage aux fausses promesses de Sarkozy à propos du site industriel de Gandrange (lequel ne se trouve pas en Poitou-Charentes.). J'en connais qui ont été impressionnés, notamment par ce passage, où Mme Royal évoquait le coeur du site sidérurgique, le four :

- Les ouvriers l'appellent "la cathédrale".

Même Bruno Solo en est resté bouche bée.

Et puis il y a eu, il n'y a pas si longtemps, cette réunion des politiciens en barboteuse du PS, quelque part dans le sud de la France, ceux qui s'appellent les "quadras", pour parler des primaires et se regarder le nombril. Et c'est là qu'intervient une déclaration apparemment anodine, de Ségolène Royal, le genre de chose auquel les chaînes nationales de radio et télévision accordent royalement deux minutes et des poussières. Il y était question de la taxe carbone. Et allez comprendre pourquoi, quelques jours plus tard, le landerneau politique ne se préoccupait plus que d'une chose : de la taxe carbone vilipendée par Ségolène Royal, ce qui a eu pour effet de déstabiliser jusqu'aux écologistes eux-mêmes, plus que gênés aux entournures, d'autant plus que les premiers sondages n'ont pas tardé à insinuer que la majorité des personnes interrogées étaient défavorables à ladite taxe.

J'encourage vivement Jean-Michel Normand et les politocrates de sa corporation à demander à Messieurs Fillon, Borlo et consorts de l'UMP qui, de Ségolène Royal, Cohn-Bendit, Duflot ou Martine Aubry a infligé les plus grosses secousses au gouvernement en matière de taxe carbone !

Mon petit doigt me dit deux choses :
1) que les principaux responsables de droite ont dû faire "ouf" en apprenant que Ségolène Royal ne serait pas la première secrétaire du PS ;
2) qu'à l'approche des élections régionales, les ténors de l'UMP redoutent par-dessus tout une chose : que Ségolène Royal soit - de facto - intronisée par ses pairs, présidents (PS) de région sortants, en qualité de chef d'Etat-major, histoire de booster la campagne, car, avec une telle cheftaine à leur tête, je vois au moins une région de plus, probablement l'Alsace, tomber à gauche.

mercredi 9 décembre 2009

"Prototype"



Ce qui suit est un courrier que j'ai adressé au Mouvement contre le Racisme et pour l'Amitié entre les Peuples, MRAP, comme suite à la plainte qu'il a introduite contre Brice Hortefeux, ministre français de l'Intérieur, lequel aurait tenu des propos racistes à l'égard d'un jeune militant UMP d'origine nord-africaine.

/.../

Le 8 décembre 2009


Objet : Brice Hortefeux


Destinataire : MRAP, Paris


Monsieur le secrétaire général du MRAP,

Les propos de Brice Hortefeux, en septembre dernier, en marge d'une manifestation de l'UMP, ont abondamment défrayé la chronique, au point de susciter une plainte de votre part contre le ministre de l'Intérieur, accusé de racisme anti-arabe.

Je dois vous avouer que, dans un premier temps, je me suis totalement désintéressé de la question, puis j'ai fini par faire comme beaucoup de gens, en consultant les médias ainsi que les nombreuses vidéos disponibles sur Internet.

Je reproduis, ci-dessous, deux citations, récupérées sur Internet, soit sur un site journalistique (neutre) et un site « communautaire » ouvertement anti-Hortefeux.


I. Source : latribune.fr

Le Mrap porte plainte contre Brice Hortefeux, accusé de racisme PARIS (Reuters) - Le Mrap a décidé de porter plainte contre le ministre de l'Intérieur Brice Hortefeux pour "diffamation à caractère raciste" après ses propos ambigus envers un militant UMP d'origine maghrébine.

Dans un communiqué, le Mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples juge les propos du ministre "profondément humiliants et attentatoires à la dignité et la considération des personnes d'origine arabe".

Brice Hortefeux, soutenu par de très nombreux membres du gouvernement et l'UMP, s'est défendu d'avoir "mentionné une quelconque origine" lorsqu'il s'est adressé à un jeune militant UMP d'origine maghrébine le 5 septembre, sur le campus d'été des Jeunes UMP à Seignosse (Landes).

Mais pour le Mrap, Brice Hortefeux "a non seulement failli à son statut de ministre qui représente les valeurs de la République, mais de surcroît a participé à l'incitation à la discrimination, confortant ainsi les préjugés racistes en y apportant sa contribution". En conséquence, l'organisation demande sa démission de son poste ministériel.

LA LICRA JUGE LA POLÉMIQUE "CLOSE".

En revanche, pour la Ligue internationale contre le racisme et l'antisémitisme (Licra), la polémique est close. "Le ministre a clairement réaffirmé à la Licra sa détermination à lutter contre toutes les formes de discrimination et de travailler utilement aux questions d'intégration", explique l'organisation non gouvernementale, présidée par l'ancien député européen UMP Patrick Gaubert. "La Licra ne participera pas à la polémique politico-médiatique (...) et considère cette affaire comme close pour elle", ajoute-t-elle.

Depuis la diffusion sur internet de la vidéo dans laquelle on l'entend tenir les propos mis en cause, l'opposition réclame la démission de Brice Hortefeux.

Plusieurs associations ont en outre demandé des excuses au ministre. Mais le secrétaire général de la présidence, Claude Guéant, a affirmé sur RTL que Brice Hortefeux n'avait pas à s'excuser pour une phrase "sortie de son contexte".

Dans l'enregistrement réalisé par des journalistes des chaînes Public Sénat et LCP, on entend un militant dire à propos du jeune homme, membre de la section Auvergne de l'UMP: "C'est notre petit Arabe." Ce à quoi le ministre semble répondre : "Il en faut toujours un. Quand il y en a un, ça va. C'est quand il y en a beaucoup qu'il y a des problèmes."

Assurant qu'il parlait des Auvergnats, dont il est aussi question dans cette conversation, Brice Hortefeux a tenté de faire taire la polémique. Il a notamment partagé un dîner de rupture du jeûne du ramadan vendredi avec des musulmans à Clermont-Ferrand et devait faire de même lundi soir à Paris, à l'invitation du Conseil français du culte musulman.

Grégory Blachier et Gérard Bon, édité par Yves Clarisse


II. Source : lesogres.info

Le script verbatim :

Ahmid demande à être photographié en compagnie de Jean-François Copé et de Brice Hortefeux.

Hortefeux dit quelque chose qui fait rire le jeune homme (pas audible)
- Copé : - N’oubliez jamais un truc, il est auvergnat..
- Hortefeux : Je suis auvergnat.... (le reste n’est pas audible)
- Copé : - Et auvergnat, c’est un drame.. un drame.
- Hortefeux s’écartant : - Bon, je vais faire un exception
- Ahmid s’approchant timidement pour poser pour la photo : - Je me mets entre les deux.
- Copé : - Pour moi, aucun problème, moi.
- Un homme s’apprêtant à les photographier : - Oh Ahmid... Ahmid Hamilton, c’est d’un drôle !
Les gens les regardant réunis tous les trois : - Ah ça c’est de l’intégration. C’est de l’intégration, Ahmid ! Franchement !
- Hortefeux : - Il est beaucoup plus grand que nous en fait.
Des gens derrière eux les interpellent en riant : - Lui, il parle arabe. (peut-être une réponse humoristique à l’affirmation d’Hortefeux sur le fait que tout est parti de paroles où il dit qu’il est si auvergnat qu’il parle auvergnat !)
Copé se retournant et d’adressant à Ahmid : - Ne vous laissez pas impressionner, c’est des socialistes infiltrés, surtout elle.
Une dame (la "surtout elle" de Copé) touchant le visage et les cheveux d’Ahmid : - Il est kabyle, il est kabyle... Il mange du cochon et il boit de la bière.
Hortefeux en souriant : - Bon, il ne correspond pas au prototype alors. C’est pas du tout ça !
Hortefeux : - Il en faut toujours un, quand il y en a un, ça va. C’est quand il y en a beaucoup que ça créé des problèmes.

Puis se retournant, il s’en va en disant : - Allez, bon courage !
Ahmid : - Merci !


Chers amis du MRAP,

Nous sommes le 8 décembre, soit pas loin de trois mois après la polémique en question, et après la consultation de dizaines de sites Internet traitant des propos de Brice Hortefeux, je dois vous avouer mon admiration, s'agissant de la sagacité dont vous avez fait preuve, au point de comprendre, en un rien de temps, que Hortefeux était raciste. Parce que, figurez-vous que moi, trois mois après, je m'interroge toujours !

De chacune des deux citations précédentes, j'ai extrait un passage que j'estime particulièrement significatif :

I. Source : latribune.fr

« Dans l'enregistrement réalisé par des journalistes des chaînes Public Sénat et LCP, on entend un militant dire à propos du jeune homme, membre de la section Auvergne de l'UMP : "C'est notre petit Arabe." Ce à quoi le ministre semble répondre : "Il en faut toujours un. Quand il y en a un, ça va. C'est quand il y en a beaucoup qu'il y a des problèmes." »

Fin de citation

II. Source : lesogres.info

« Une dame (la "surtout elle" de Copé) touchant le visage et les cheveux d’Ahmid : Il est kabyle, il est kabyle... Il mange du cochon et il boit de la bière.
Hortefeux en souriant : - Bon, il ne correspond pas au prototype alors. C’est pas du tout ça !
Hortefeux : - Il en faut toujours un, quand il y en a un, ça va. C’est quand il y en a beaucoup que ça créé des problèmes. »

Fin de citation


Entre nous, avouez que les deux citations ne collent pas complètement !

« Moi, j'ai lu et entendu partout, que Brice Hortefeux aurait dit : "Il en faut toujours un. Quand il y en a un, ça va. C'est quand il y en a beaucoup qu'il y a des problèmes." »

Et c'est précisément cette phrase-là qui a déclenché la polémique. Le problème est qu'avant cette fameuse phrase, dans le style : « un ça va...», Hortefeux a dit autre chose que peu d'observateurs et de commentateurs ont entendu, mais que l'on retrouve dans la seconde citation :

"Hortefeux en souriant : Bon, il ne correspond pas au prototype alors. C’est pas du tout ça !"

Reconnaissons au passage que c'est sur un site ouvertement communautaire, et franchement anti-sarkozyste et anti-Hortefeux, que l'on a la transcription la plus fidèle des propos du ministre !

Il ne correspond pas au prototype, dit le ministre. Mais pourquoi, ai-je tout de suite pensé, parle-t-il de prototype, terme qui aurait plutôt correspondu à un processus de fabrication, comme on en connaît dans l'industrie ? Et s'il avait voulu dire autre chose ?

Et c'est là que je me dis que le ministre a commis un quasi-lapsus, peut-être l'a-t-il même fait volontairement.

En effet, tout part de cette charmante militante UMP, qui semble connaître le jeune Ahmid, qui boit de la bière et mange du cochon..., ce qui, selon le ministre, ne correspondrait pas au prototype, en fait, au STÉRÉOTYPE... !

Savez-vous ce que c'est qu'un stéréotype, chers amis du MRAP ?

C'est un poncif, une image d'Epinal, une « pseudo-vérité » colportée depuis belle lurette au point de sembler vraie. Quelques exemples : les Juifs ont de l'argent (cf. le gang des Barbares), les (footballeurs) Italiens sont des tricheurs (cf. certains supporters français) ; les Allemands sont ultra-disciplinés, les Gitans sont des voleurs de poules, les Chinois sont sournois et obséquieux, les Africains sont tous polygames, les Musulmans tyranisent leurs épouses, les Blancs sont tous racistes, etc.

Bref, un stéréotype, c'est une croyance à laquelle les gens simples adhèrent un peu trop rapidement... Mais Brice Hortefeux, qui est un homme courtois, du moins le pensé-je, n'a pas voulu vexer sa militante UMP, c'est la raison pour laquelle il commet ce quasi-lapsus en édulcorant le stéréotype en prototype.

C'est, en tout cas, la conclusion à laquelle je suis parvenu après bientôt trois mois de cogitations. Et j'ai la prétention de croire que c'est moi qui ai raison. Et c'est là que ça devient intéressant.

Question : Brice Hortefeux émet la thèse du prototype/stéréotype pour y adhérer ou plutôt pour s'en détacher ? L'utilisation du terme (prototype/stéréotype) ne contient-elle pas, en filigrane, un début de désapprobation des propos de la militante UMP ?

Ma conviction est que le ministre prend (gentiment) ses distances avec le poncif formulé par son interlocutrice : « les Arabes sont comme ci, ou comme ça, sauf celui-là... », sous-entendu, lui au moins n'est pas comme les autres. En évitant de parler de stéréotype, Brice Hortefeux n'a-t-il pas voulu ménager la susceptibilité de la militante de l'UMP ?

Voici, en substance, ce que, selon moi, Brice Hortefeux a voulu dire, en substance : « Chère madame, ce jeune homme ne correspond pas au stéréotype, à l'image d'Epinal que vous vous faites des Arabes : lui mange du porc et boit de la bière, ce qui en fait, selon vous, un « bon Arabe » ; car j'imagine que vous devez également penser, à propos des Arabes, que quand il y en a un, ça va ; c'est quand il y en a beaucoup qu'il y aurait des problèmes. »

On comprend mieux la suite, avec les hésitations du ministre à propos de la portée réelle de sa déclaration.

Entre nous, amis du MRAP et d'ailleurs, seriez-vous prêts à jurer, la main sur le cœur, que ce que j'avance est faux ? Et pouvez-vous certifier qu'il n'y a pas l'ombre d'une chance pour que mon analyse soit exacte ?

Franchement, j'ai du mal à comprendre que vous - tout le monde ! - soyez tombés dans le panneau consistant, dans un premier temps, à lire les propos du ministre avec de grosses loupes déformantes et, dans un deuxième temps, à saisir systématiquement les tribunaux à propos de tout et de rien. Je sais que la chose est à la mode, en ces temps de « juridictionnalisation » de la moindre polémique, comme si les magistrats n'avaient pas autre chose à faire !

Je sais bien que le français est une langue subtile, mais toutes les langues le sont : la langue des Inuit n'a-t-elle pas des dizaines de mots pour désigner toutes les nuances de la neige, et l'arabe et le berbère n'ont-ils pas des dizaines de termes pour désigner toutes les nuances du sable ou du désert ou tous les avatars de tel animal (chameau/dromadaire) ? Toutes nuances difficilement perceptibles par l'outsider, l'étranger ?

C'est précisément un critère de bonne intégration dans une culture que la maîtrise parfaite de certaines subtilités de la langue. Et là, je dois avouer qu'en ces temps de parlote autour de l'identité nationale, le tohu-bohu provoqué par les propos (anodins) de Brice Hortefeux nous révèle que la maîtrise du français, au sein du microcosme politico-médiatique, laisse encore énormément à désirer !

Je vous signale, en passant, que j'adresse une copie de la présente à Monsieur Hortefeux, et que je l'autorise à en faire l'usage qu'il voudra, y compris devant un tribunal.

Personnellement, je ne saurais affirmer que Brice Hortefeux n'ait jamais tenu de propos racistes, ne connaissant pas l'homme. Mais ce dont je suis à peu près certain, c'est qu'il n'y a pas l'ombre d'une attaque raciste dans les propos qu'il a tenus en présence du jeune Ahmid, l'épisode en question ne justifiant en rien une procédure judiciaire.

Et pour que les choses soient bien claires, je suis un sympathisant de gauche ; j'ai soutenu la campagne de Ségolène Royal, dont j'estime qu'elle a été, en 2007, la meilleure candidate à la présidentielle et qu'elle reste la personnalité politique qui a le mieux compris l'état de la France, à commencer par les couches populaires, de même qu'elle est, et de loin, la personnalité française qui jouit de la meilleure image en Afrique, notamment depuis un certain (contre-)discours de Dakar ! J'estime, donc, qu'en 2007, les Français ont misé sur le mauvais cheval, et je suis navré de voir des gens comme Hortefeux perdre leur temps et leur énergie au service d'un aussi piètre "général de brigade" !

Mais le fait d'être de gauche et peu suspect de sarkophilie ne me semble nullement incompatible - ce serait même tout le contraire ! - avec un minimum d'honnêteté intellectuelle, qualité qui semble faire cruellement défaut à bien des commentateurs (notamment à gauche !), dont la mauvaise foi ne sert en rien l'antiracisme dont ils prétendent se réclamer.

Je précise, s'il en était besoin, que je suis Africain à 100 %, non naturalisé Français, détenteur d'une carte de résident de 10 ans (2007-2017), que je travaille, et que je n'ai pas la moindre intention d'adhérer à l'UMP ni de réclamer quelque service que ce soit à Monsieur Hortefeux. Du reste, à propos du jeune Ahmid, je lui adresserais volontiers un message de soutien et de sympathie, même si j'estime qu'à son âge, on est généralement contestataire, donc plutôt de gauche (encore un stéréotype !).

Ma conviction, chers amis antiracistes, est que vous allez devoir retirer votre plainte, à moins que vous ne cherchiez à vous couvrir de ridicule ! Mais au ridicule, nul n'est tenu !

Veuillez tout de même agréer l'expression de mes salutations distinguées.

R. W.


P.s. Je suppose que vous avez aussi porté plainte contre les propos, ouvertement racistes, eux, de Manuel Valls, maire d'Evry, à propos du trop faible nombre de "blancos"... ?